Comprendre la courbe du deuil face au changement : un levier pour mieux traverser les transformations #
Origines et fondements de la courbe du deuil appliquée au changement #
La courbe du deuil, formulée par la psychiatre Elisabeth Kübler-Ross, repose à l’origine sur l’accompagnement des personnes confrontées à l’annonce de maladies graves ou au décès. Au fil des décennies, ce modèle s’est avéré tout aussi pertinent pour décrypter les réactions face à tout bouleversement radical du quotidien, qu’il concerne la sphère privée ou professionnelle.
L’adaptation de la courbe de Kübler-Ross aux transformations organisationnelles s’est accélérée lors de la généralisation des restructurations d’entreprises et des évolutions de carrières. Les acteurs du changement utilisent aujourd’hui ce cadre pour décrypter les réactions collectives, que l’on observe lors de l’implémentation d’un nouvel ERP, d’une fusion-acquisition ou d’une réorganisation majeure. Cette approche rend visibles les étapes psychologiques traversées, de la sidération initiale à l’acceptation, et aide à dépasser l’analyse strictement rationnelle des transitions pour y intégrer l’indispensable dimension émotionnelle.
- Elisabeth Kübler-Ross a conceptualisé les cinq étapes du deuil dans un contexte clinique, puis ce schéma a été étendu aux dynamiques de conduite du changement.
- Le modèle offre un repère pour comprendre pourquoi les collaborateurs réagissent différemment lorsqu’ils quittent un cadre familier.
- La courbe du deuil s’est imposée dans la littérature de management comme une base pour anticiper les résistances et accompagner les mutations.
Étapes émotionnelles traversées lors d’un changement majeur #
L’application de la courbe de Kübler-Ross à la gestion du changement met en lumière six étapes fondamentales : le choc, le déni, la colère, la négociation, la tristesse (ou dépression), puis l’acceptation.
À lire Comprendre la courbe du deuil face au changement : enjeux et leviers d’accompagnement
- Choc : Phase d’immobilisme ou de sidération, typique lors de l’annonce d’un plan de licenciement collectif.
- Déni : Rejet ou minimisation de l’impact du changement, constaté dans les équipes migrantes vers un nouveau système informatique.
- Colère : Expression d’insatisfaction, fréquente lors de la nomination d’un nouveau dirigeant dont la légitimité est contestée.
- Négociation : Tentative de négocier les modalités du changement, comme la demande de conserver certains avantages dans une réorganisation des horaires.
- Tristesse : Sentiment de perte ou de découragement, souvent observé après l’échec d’un projet ou la perte d’un poste clé.
- Acceptation : Période d’appropriation, marquant le début de réengagement, illustrée lors de la prise en main d’outils collaboratifs dans un projet de digitalisation.
La traversée de ces étapes ne se fait ni linéairement ni uniformément. Certaines personnes peuvent rester plus longtemps dans une phase, générant des tensions ou de la démotivation, tandis que d’autres progressent plus rapidement vers l’intégration du changement.
Impact du processus sur la performance et la motivation #
Lors d’un bouleversement majeur, la courbe du changement révèle un creux de performance temporaire inévitable. À l’annonce d’une fusion, par exemple, la productivité et la motivation chutent souvent, le temps que chacun digère l’information et se réorganise mentalement. Ce phénomène, bien documenté lors du passage au télétravail en 2020 dans de nombreuses entreprises françaises, témoigne de la réalité du vécu émotionnel dans le monde du travail.
Ce passage à vide n’est pas un échec mais le reflet d’un processus d’adaptation normal. Reconnaître et prévoir cette baisse temporaire donne la possibilité aux managers d’éviter des exigences irréalistes et de réajuster les objectifs. Dès que l’acceptation et la reconstruction émergent, la performance repart à la hausse, parfois même plus haut qu’auparavant.
- L’efficacité opérationnelle enregistre un ralentissement lors des phases de résistance, notamment dans la transition post-implantation de nouveaux outils digitaux.
- La motivation fluctue, avec des risques accrus de désengagement dans des contextes mal accompagnés ou de manque d’écoute.
- Le rebond final permet non seulement de retrouver le niveau antérieur, mais souvent de monter en compétences grâce à l’intégration du changement.
Reconnaître et gérer les résistances : un atout pour la conduite du changement #
Les résistances à la transformation ne doivent pas être interprétées comme des obstacles irrationnels, mais comme l’expression légitime d’un processus émotionnel de transition. En juillet 2022, lors de l’introduction d’un nouvel outil CRM dans une grande entreprise de vente à distance, la direction a constaté des remontées de préoccupations, d’abord sous forme de critiques, puis, après identification des phases sur la courbe du deuil, par des propositions constructives d’adaptation.
Cartographier où chaque équipe ou collaborateur se situe sur la courbe permet d’ajuster la communication, d’organiser des ateliers d’expression ou de mobiliser des relais internes. Cela évite l’escalade des tensions et favorise une adhésion plus rapide au nouvel environnement.
- Personnalisation du management en identifiant la phase émotionnelle de chacun.
- Mise en place de soutiens ciblés : cellules d’écoute ou coaching lors de grands plans sociaux ou déménagements de sites.
- Réduction du taux de démission grâce à une anticipation fine des résistances et une réponse contextualisée.
Utilisations concrètes de la courbe du deuil dans l’accompagnement au changement #
L’utilisation opérationnelle de la courbe du deuil dépasse le simple état des lieux émotionnel. Elle s’intègre dès la phase de diagnostic, lors des ateliers de co-construction dans des programmes d’innovation, ou dans l’élaboration de plans d’action RH spécifiques. En 2023, la société allemande Siemens a, lors de la fusion de certains services, élaboré un baromètre interne aligné sur les étapes de Kübler-Ross, permettant de déclencher des campagnes de formation au moment pertinent.
Les dispositifs d’accompagnement se structurent alors autour des besoins identifiés : séances de feedback, communication transparente, journées dédiées à la découverte des nouveaux processus, cellules de médiation, ou encore appui psychologique en cas de difficultés majeures. Ce pilotage précis transforme la courbe du deuil en véritable outil d’engagement collectif, catalyseur d’une résilience accrue.
- Outils RH adaptés au stade émotionnel : coaching, mentorat, sessions d’accueil sur-mesure lors de réorganisations.
- Déploiement de stratégies managériales progressives : communication différenciée entre les équipes en déni et celles en phase d’acceptation.
- Mesure de l’adhésion par questionnaires anonymes, réajustement des actions selon le retour du terrain, et implication forte du top management lors de la phase d’acceptation.
Limites du modèle et perspectives d’adaptation aux réalités actuelles #
La popularité de la courbe du deuil ne doit pas occulter ses limites. En pratique, chaque parcours de changement reste singulier et ne saurait se résumer à une courbe universelle. Lors de la digitalisation accélérée des process RH en 2024, certains départements ont rapidement franchi les étapes tandis que d’autres sont restés durablement en résistance, illustrant la nécessité de croiser ce modèle avec des outils de veille psychosociale et d’intelligence collective.
À lire Le secret d’une visibilité web maximale : Transformer votre site grâce au Cocon Sémantique
Nos expériences montrent qu’intégrer la diversité des vécus, mais aussi des facteurs contextuels (ancienneté, culture d’entreprise, historique personnel par rapport au changement), s’avère indispensable. Associer la courbe de Kübler-Ross à des démarches participatives, à la théorie de l’engagement ou au design thinking émotionnel, renforce la pertinence de l’accompagnement et favorise une transformation personnelle et collective plus réussie.
- La courbe du deuil constitue un repère, mais nécessite des ajustements pour chaque collectivité humaine, particulièrement en environnement multiculturel.
- La prise en compte de l’intelligence émotionnelle et des retours terrain permet d’enrichir la démarche et de répondre à l’hétérogénéité des profils.
- Le recours à des outils complémentaires tels que le co-développement ou les groupes de parole améliore le traitement des situations complexes et inattendues.
Plan de l'article
- Comprendre la courbe du deuil face au changement : un levier pour mieux traverser les transformations
- Origines et fondements de la courbe du deuil appliquée au changement
- Étapes émotionnelles traversées lors d’un changement majeur
- Impact du processus sur la performance et la motivation
- Reconnaître et gérer les résistances : un atout pour la conduite du changement
- Utilisations concrètes de la courbe du deuil dans l’accompagnement au changement
- Limites du modèle et perspectives d’adaptation aux réalités actuelles